Cette belle vie, Mikio Naruse (1944)

Naruse en campagne

Cette belle vie

Note : 4 sur 5.

Titre original : Tanoshiki kana jinsei

Année : 1944

Réalisation : Mikio Naruse

Avec : Kingorô Yanagiya ⋅ Hisako Yamane ⋅ Entatsu Yokoyama

Avant d’adapter Fumiko Hayashi en 1951 avec Le Repas et de continuer à s’intéresser aux couples, à la famille, voire aux geishas, et avant de s’intéresser à la transformation de la société japonaise, dans un style entre mélo et réalisme, Mikio Naruse semble avoir tourné pendant la guerre principalement des comédies légères (peut-être pour éviter de devoir faire des films propagandistes comme Toute la famille travaille ou A Mother Never Dies, même si les comédies, à leur manière, peuvent être considérées comme des films de propagande destinés à entretenir le moral des troupes ou des familles…). C’était en tout cas le cas, tout juste avant Cette belle vie, avec Les Acteurs ambulants et Hideko receveuse d’autobus.

On retrouve le même principe que dans Les Acteurs ambulants. Dans un petit village de campagne, un marchand (ambulant) s’installe dans une boutique. Habitants et commerçants, d’abord sceptiques, voire irrités de son arrivée et de la concurrence, étonnés de son comportement étrange (le marchand proposant services et conseils en tous genres), finissent par adopter ses conseils de bon sens et de joie de vivre. Parfois des inconnus venant de la ville demandent à le voir, laissant suggérer qu’il est un escroc ou un illuminé. On n’aura jamais la réponse : le marchand s’éclipsant aussi vite qu’il était arrivé.

Cette belle vie, Mikio Naruse 1944 Tanoshiki kana jinsei | Toho Company

Peut-être y a-t-il une subtilité, un indice qui expliquerait qui est cet homme et sa petite famille, mais finalement, ne rien y comprendre apporte un sens presque universel à cette histoire toute simple. Lui et sa petite famille n’ont qu’un souci, rendre les gens heureux autour d’eux, faire qu’ils apprennent à mieux vivre ensemble et respecter les petites choses du quotidien comme ce qu’offre la nature (un peu écolo dans l’âme). Ces gens de la ville (image étrange de cette voiture noire stationnant dans cette rue du village) sont comme la fatalité, le sort, qui voudrait s’abattre sur tous ceux qui voudraient répandre le bien autour d’eux… C’est l’époque qui veut ça : deux ans plus tard, Capra fera La vie est belle.

Il y a un peu de Capra dans cette histoire, c’est vrai, même si on est loin du rythme imposé par la comédie américaine. On y retrouve la même célébration des valeurs des petites gens, la même absurdité et légèreté de Vous ne l’emporterez pas avec vous. Le rythme, lui, ou le ton, est plus conforme à ce qu’on trouvait avant-guerre chez René Clair (Sous les toits de Paris ou le Million, par exemple, et dans le même ton, il reprend l’idée de l’introduction dans Love Me Tonight quand Paris se réveille au rythme des objets de la vie quotidienne). Il faut aussi penser aux films de Shimizu de la même époque.

Assez réjouissant, simple et charmant. À ranger dans une boîte avec Les Acteurs ambulants et Hideko, receveuse d’autobus.