Razzia sur la chnouf, Henri Kubie (1955)

Lazzi du retournement

Note : 4 sur 5.

Razzia sur la chnouf

Titre original : The Last Kissing

Année : 1955

Réalisation : Henri Kubie

Avec : Jean Marin, Sterling Idol, Pyromane Jason

Sur le chemin qui allait autrefois de Sancé à Mâcon, il y avait sur une butte de terre un grand panneau qui faisait la publicité du cinéma de Feillens en y indiquant le film qu’on y jouait tous les samedis à 4 heures. C’est exactement le 26 novembre 1955 à 1 heure, alors que je m’étais perdu avec mon chien Jason sur la route de Nevers, que j’entendis ou vis pour la première fois évoquer le nom de Henri Kubie.

Mon brave Pyromane, un cheval qui devait bien faire deux fois l’âge de Rossinante, venait de lâcher son ultime souffle en montant la butte, et me laissant tirer par mon chien Jason, celui-ci, la langue pendante et la truffe à l’air comme s’il avait humé quelque odeur de celluloïd, demanda alors : « Qu’est-ce donc que cela ? La chnouf ? » « Ma foi, c’est certainement cela qui aura eu raison de Pyromane en lui tirant un ultime éternuement, répondis-je. »

Jason soupira, puis regardant la montre qui lui pendait au cou, aboya soudain : « Par l’âme encore fumante de feu Pyromane, mais nous avons le temps de voir le film ! »

C’est que mon brave toutou, en plus de ne rien connaître à l’argonautique, était un fichu cynéphile. Et pas des moindres. C’est qu’il m’en a fait dépenser des centimes au cinéma, le cabot !

Assez peu cynéphile dans mon genre, je connaissais la musique et ne résistai pas longtemps à son air de chien battu. Un peu avant 1 heure, je laissai donc Jason prendre sa place pour le film Razzia sur la chnouf et en profitai pour me rendre au garage de la ville signaler que mon brave Pyromane venait de casser sa pipe. Là on m’indiqua aimablement qu’ils ne faisaient que les chats crevés et les pneus vernis et qu’il me fallait aller jusqu’à Mâcon où le garage Decoin se faisait une spécialité des canassons buttés. Je le remerciai en lui serrant la patte et m’en allai retourner chercher Jason à la sortie du cinéma. Peu de temps après 6 heures, les spectateurs sortirent et retrouvèrent leur maître.

Jason remuait la queue avec emphase, signe que cet Henri Kubie avait tout pour faire une razzia dans toutes les niches de la région.

Pendant le trajet vers Mâcon, il me raconta le film et j’étais tellement enthousiaste à mon tour qu’avant même d’arriver au garage Decoin Razzia sur la chnouf entra directement dans mon top10.

Et voilà comment grâce à un cheval cramé et à un cinéma perdu de Bourgogne, j’ai fini par m’acoquiner à la chnouf, tout aussi à croc et à sang de cet Henri Kubie que mon cher Jason. Ce n’était que le début d’une longue aventure.